Page d’histoire : c'était Etienne Tshisekedi wa Mulumba

Page d’histoire : c'était Etienne Tshisekedi wa Mulumba

Les Arabes occupent l'Est du pays

On peut considérer que l’histoire d’Etienne Tshisekedi commence à l’Est de ce qui deviendra plus tard la République Démocratique du Congo. En effet, durant la seconde moitié du 19ème siècle, l’Est du Congo est dominé par des trafiquants arabo-musulmans qui se font appeler les « Bangwana » ou les « Baswahili ». Ces étrangers parlent une langue qui est un mélange de l’arabe et des langues bantoues. Cette langue sera appelée le « Kiswahili » et deviendra l’une des quatre langues nationales de la RDC.

Des trafiquants avec des armées

Ces trafiquants arabo-musulmans parcourent la région à la recherche essentiellement de deux produits : les esclaves et les pointes d’ivoire. Pour atteindre leurs objectifs, ils se sont constitués des armées de mercenaires indigènes qu’ils ont formés au maniement d'armes à feu et à la tactique moderne.

La plupart de ces « Swahili » étaient des métis, c’est-à-dire des fils d’Arabes et de mères africaines.

Mohamed El Mujerbi alias Tippo-Tippo

C’est le cas du plus célèbre d’entre eux qui répondait au nom de Mohamed El Mujerbi. Il sera plus connu par son sobriquet de Tippo-Tippo pour son embonpoint quand il était un petit garçon. En effet, en swahili, on appelle enfant obèse "mutiputipu". Tippo-Tippo décide de créer un sultanat à l’Est du congo, avec deux principales cités dans le Maniema : Nyangwe et Kasongo. Selon certains historiens, le mot Maniema proviendrait du mot arabe "Manaama" qui signifie lieu de repos.

Ngongo Lutete

Tippo-Tippo aura un lieutenant « Congolais » ou autochtone du nom de Ngongo Lutete. Ce Tetela va, avec son armée, terroriser toute la région du Kasaï où il organisait des razzias pour capturer des esclaves qu’il ramenait à son patron Tippo-Tippo.

Celui-ci, à son tour, convoyait cette « marchandise humaine » vers le grand marché de Zanzibar où elle était vendue.

Les luba fuient l'insécurité et vont dans la région des luluwa

Comme il est difficile de se cacher dans la savane de la région du Kasaï, une partie de la population va fuir et trouver refuge auprès de quelques postes que les Belges venaient de créer pour le compte de l’État Indépendant du Congo, État créé en 1885 dans la province du Kongo Central. Les deux postes qui vont recevoir ces déplacés du Kasaï, en particulier les Luba Lubilanji (Luba du Kasaï Oriental) sont le poste de Lusambo et celui de Luluabourg.

Des leaders luba naissent au Kasai occidental

Après le démantèlement du régime « arabe » par l’EIC, à l’Est du Congo, il y aura une seconde vague de migration des Luba Lubilanji vers l’actuelle Kasaï Occidental.

Ces nouveaux migrants sont à la recherche d'emplois et d'écoles pour leurs enfants. C’est ce qui explique la naissance dans le Kasaï Occidental de la plupart des grands Leaders Luba du Kasaï Oriental.

Quelques exemples :

1° Joseph Ngalula, né le décembre 1928 à Lusambo.
2° Albert Kalonji, né le 06 juin 1929 à Bukonde (± 70Km de Kananga).
3° Jonas Mukamba, né le 04 janvier 1930 à Tshikapa.

La naissance d'Etienne Tshisekedi à Kabuluanda

C’est dans ce contexte qu’un catéchiste de la mission catholique de Kabuluanda (Papa malongi en lingala) du nom d’Alexis Mulumba et son épouse, Agnès Kabena Mwauka, vont donner naissance le 14 décembre 1932 à un petit garçon qu’ils vont appeler Etienne Tshisekedi. Pourquoi ce prénom d’Etienne ? Tout simplement parce que les catholiques fêtent le 1er martyr chrétien, Saint–Etienne, au mois de décembre et que le petit garçon est né aussi au mois de décembre.

Les frères et sœurs d'Etienne Tshisekedi


Gérard Mulumba, l'un des frères d'Etienne Tshisekedi

Le couple Alexis Mulumba et Agnès Kabena aura en tout 8 enfants (6 garçons et 2 filles).

1° Shambuyi Lumbala
2° Etienne Tshisekedi
3° Alexis Mulumba
4° Gabriel Lusangu
5° Gérard Mulumba
6° Eugénie Tshika
7° Petronie Kapinga
8° Kapela Mulumba

Les deux derniers membres de cette fratrie sont encore en vie.

La scolarité d'Etienne Tshisekedi

Le petit Etienne Tshisekedi va faire ses études à l’école de la mission de Kabuluanda où son père, Alexis Mulumba, est devenu moniteur. Après ses études primaires, Etienne Tshisekedi est envoyé à l’internat du Collège Saint Jean-Berchmans de Kamponde. Cette école est gérée par des prêtres catholiques de la congrégation des « Pères de Scheut » ou les scheutistes. En 1954, Etienne Tshisekedi termine son cycle secondaire.

La rencontre avec Marthe Kasalu Jibikila

Il vient alors à Luluabourg. Son ambition est d’aller poursuivre ses études supérieures à l’Université Lovanium qui venait d’ouvrir ses portes la même année à Kimwwenza, dans la périphérie de Léopoldville. En attendant d’aller dans la capitale du Congo-Belge, Etienne Tshisekedi trouve un emploi de commis à la BBA (Banque Belge d’Afrique) de Luluabourg. C’est pendant son séjour dans la capitale de la province du Kasaï, qu’Etienne Tshisekedi fera la connaissance, par le canal de son ami Kizito Kalala, d’une belle jeune fille qui venait de terminer sa formation d’infirmière à Mikalayi : Marthe Kasalu Jibikila. Pour Etienne Tshisekedi, c’est le coup de foudre.

Etienne Tshisekedi suit Marthe Kasalu à Luiza

Malheureusement pour lui, Marthe Kasalu va quitter Luluabourg pour rejoindre sa grande-sœur, épouse de monsieur Mukadi, assistant social à Luiza. C’est ainsi que Marthe Kasalu devient infirmière à l’hôpital de Luiza. Impatient de revoir sa dulcinée, Etienne Tshisekedi la suit jusqu'à Luiza, où il va lui déclarer sa flamme. En 1955, les deux amoureux vont se marier à Luluabourg. Et l’homme qui va faciliter ce mariage s’appelle Léon Kazumba. Qui deviendra plus tard, sous la deuxième République, Inspecteur Général des Finances (IGF).

Etienne Tshisekedi s'inscrit à l'université Lovanium


Etienne Tshisekedi dans sa chambre d'étudiant à l'université de Lovanium

En 1956, Etienne Tshisekedi arrive à Kinshasa. Après un concours d’admission à la nouvelle faculté de Droit de l’Université de Lovanium, Etienne Tshisekedi est le seul des 150 candidats à être reçu. C’est ainsi qu’il commence son cursus universitaire, seul congolais parmi ses camarades blancs, fils de colons belges. On verra comment ce parcours exceptionnel va développer en lui, à l’âge adulte, une très haute opinion de lui–même qui frisait parfois l’arrogance, mais nécessaire dans ces temps-là où il fallait affronter le complexe de supériorité des étudiants blancs.

Les enfants du couple Etienne Tshisekedi et Marthe Kasalu

En 1957, son épouse Marthe Kasalu va le rejoindre à Kinshasa. Le couple est logé dans le camp des étudiants mariés situé sur le campus de l’Université. En 1958, Etienne Tshisekedi et son épouse vont avoir leur premier enfant qu’ils vont appeler Jean-Claude Mulumba.

En tout, le couple aura 6 garçons :

1° Jean-Claude Mulumba (1958)
2° Roger Ilunga (1960)
3° Félix Tshilombo (1963)
4° Christian Tshimini
5° Jacques Tshibanda
6° Thierry Tshisekedi

Il faut noter qu'Étienne Tshisekedi aura d'autres enfants en dehors de ce couple.

Comment Etienne Tshisekedi, qui rêvait de devenir juge, va devenir politicien ?

Comment ce jeune et brillant étudiant, qui voulait devenir magistrat, va-t-il se retrouver entraîné dans la politique ? Et même intégrer le gouvernement en 1960 alors qu’il n’a même pas encore achevé ses études ?

Comment et pourquoi Albert Kalonji va-t-il le nommer ministre de la Justice de la sécession Kasaïenne ?

Comment, après la prise de pouvoir par le général Joseph-Désiré Mobutu en 1965, Etienne Tshisekedi se retrouve-t-il ministre de l’Intérieur et numéro 2 du régime ?

 

Thomas Luhaka Losendjola
Ancien président de l’Assemblée nationale, ancien ministre, avocat et Député national

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