Dans le cadre de son mandat, le Bureau conjoint des Nations unies aux droits de l’homme (BCNUDH) en République Démocratique du Congo assure un suivi étroit de la situation des droits de l’homme et analyse les tendances y relatives dans le pays.
Ces tendances sont régulièrement partagées avec les autorités afin qu’elles prennent les actions nécessaires, y compris traduire en justice les auteurs présumés des violations des droits de l’homme documentées.
Au cours du mois de février 2025, le BCNUDH a documenté 397 violations et atteintes aux droits de l’homme sur l’ensemble du territoire de la République Démocratique du Congo, ce qui représente une augmentation de 25 % par rapport au mois de janvier 2025. Ces violations et atteintes ont fait 1.205 victimes (752 hommes, 263 femmes, 107 enfants et 83 individus de genre et âge inconnus), une augmentation de 47 % par rapport au mois précèdent.
Comme les périodes antérieures, les provinces les plus affectées sont le Nord-Kivu avec 185 violations et atteintes (le même chiffre qu’en janvier 2025), le Sud-Kivu avec 111 violations et atteintes, une augmentation de 158 % par rapport à janvier et l’Ituri avec 56 violations et atteintes, une légère augmentation par rapport à janvier. Parmi les provinces non affectées par le conflit, la province du Haut-Katanga a enregistré le plus grand nombre de violations avec 18 cas (soit 5 %) suivi par Kinshasa avec 10 cas (soit 3 %) et Maï-Ndombe (5 cas soit 1 %).
Dans les provinces non en conflit, le BCNUDH a documenté 45 violations et atteintes aux droits de l’homme, soit une augmentation de 28 % par rapport au mois de janvier. Cette augmentation reflète l’augmentation des arrestations et détentions arbitraires dans les provinces du Haut-Katanga et de Kinshasa, dans le contexte de l’expansion du M23. Les provinces du Haut-Katanga (18), et Kinshasa (10) enregistrent le plus de violations et atteintes, suivies du Maï-Ndombe (cinq), de la Tshopo (quatre), du Haut-Lomami et du Kongo central (deux chacune), du Kasaï, du Kasaï Oriental, du Kwango et de Lualaba (une chacune).
Dans les provinces en conflit, le BCNUDH a documenté 352 violations et atteintes aux droits de l’homme, ce qui représente une augmentation de 24 % par rapport au mois précédent. Cette hausse s’explique principalement par l’exacerbation de la crise a l’est du pays, avec l’avancement du M23/RDF dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, les mouvements de « repli stratégique » des FARDC au cours desquels des violations des droits de l’homme ont été commis, ainsi que les attaques des groupes armés ADF et CODECO au Nord Kivu et en Ituri. Ces violations et atteintes ont fait un total de 1.088 victimes (662 hommes, 243 femmes, 56 filles, 28 garçons et 15 enfants de genre inconnu et 84 individus de genre et âge inconnus), ce qui représente une augmentation de 54 % du nombre de victimes en comparaison avec le mois de janvier. Parmi ces victimes, le BCNUDH a documenté 403 victimes d’exécutions sommaires ou extrajudiciaires (269 hommes, 80 femmes, 32 enfants et 22 individus de genre et âge inconnu).
La situation des violences sexuelles liées au conflit (VSLC) continue d’être source d’inquiétude. L’offensive du M23 au Nord-Kivu et au Sud-Kivu a eu un effet aggravant sur la situation, avec l’augmentation de 152 % des cas de VSLC en février par rapport à janvier. Le BCNUDH a enregistré au moins 48 cas de violences sexuelles liées aux conflits avec 110 victimes (79 femmes, 30 filles et un homme) en février 2025. La province de l’Ituri a enregistré le plus grand nombre de victimes de VSLC en février 2025, soit 44 victimes (33 femmes et 11 filles), suivie par le Nord-Kivu (30 femmes, 11 filles et un homme) et par la province du Sud-Kivu avec 16 femmes et huit filles. Parmi les acteurs étatiques, les FARDC sont responsables du plus grand nombre de VSLC contre 38 victimes (27 femmes, 10 filles et un homme). Parmi les acteurs non-étatiques, la CODECO est responsable de VSLC contre 32 femmes et six filles en Ituri. Les membres du M23/RDF sont responsables de VSLC contre 11 femmes et huit filles au Nord-Kivu et au Sud-Kivu.
Au cours du mois de février 2025, le nombre de violations graves affectant des enfants dans le cadre du conflit armé en RDC documentées et vérifiées a connu une augmentation de 137 % par rapport au mois de janvier 2025. Le meurtre et mutilation ont été les violations les plus fréquentes (43 %), suivi de l’enlèvement (42 %), le recrutement et utilisation (7 %), la violence sexuelle (7 %), et les attaques contre les écoles et les hôpitaux (1 %).
Au cours du mois de février 2025, le BCNUDH a documenté six violations et atteintes aux droits de l’homme en lien avec l’espace civique avec 13 victimes, tous des hommes. Ceci constitue une augmentation par rapport au mois précédent (quatre cas) mais une diminution par rapport aux victimes (17 victimes). Trois de ces violations et atteintes ont été documentées dans la province du Sud-Kivu, deux dans la ville province de Kinshasa, et une dans la province du Haut-Lomami. Cette augmentation est en rapport avec l’insécurité consécutive à l’avancée du M23 et l’environnement créé par les replis successifs des FARDC et des Wazalendo. C’est dans ce contexte que la moitié de ces violations ont été commises par des combattants de groupes armés, précisément les Wazalendo; deux par des agents de la PNC et une violation par des agents de l’ANR.
En matière de lutte contre l’impunité, les poursuites à l’encontre des auteurs de graves violations du droit international humanitaire et des droits de l’homme ont donné lieu à la condamnation de 55 personnes à la peine de mort, dont 51 militaires des FARDC, deux agents de la PNC et deux éléments Wazalendo. Par ailleurs, les récents développements dans l’Est du pays ont conduit à des évasions dans les prisons de Goma, Kalehe, Uvira, Bukavu et Kalemie. Ces évasions ont eu pour conséquences la recrudescence de la criminalité urbaine ainsi que les actes de menaces et de représailles contre les victimes, témoins et le personnel de justice ayant pris part à des procès emblématiques.
La Gazette du Continent.