Maman Marie Muilu Kiawanga Nzitani, une héroïne oubliée

Maman Marie Muilu Kiawanga Nzitani, une héroïne oubliée

Maman Marie Muilu, celle qui fut l’épouse de Simon Kimbangu, la veuve du prophète, s’est éteinte le 27 avril 1959, à Nkamba, au Kongo Central.

Elle fait partie de ces nombreuses femmes qui ont épousé des grands hommes, et à avoir joué un rôle-clé dans la marche de l’his­­toire, mais passées souvent sous silence et reléguées aux oubliettes.

Marie Muilu, méconnue du grand public (sauf chez les Kimbanguites) a joué un rôle décisif, après la condamnation du prophète Simon Kimbangu et ses disciples, le 3 octobre 1921, par le Conseil de guerre de Thysville (Congo belge) à la peine de mort.

Le Roi Albert avait commué sa peine en détention à perpétuité, les autorités coloniales transfèrent ainsi le prophète Kimbangu à la prison d'Élisabethville au Katanga ; Il y restera jusqu'à sa mort le 12 octobre 1951.

Revenons à sa femme qui a maintenu la flamme kimbanguiste en organisant la résistance spirituelle, physique tout en bravant la répression des autorités coloniales.

Cette petite femme, mère de trois enfants, effacée, cheveux toujours tressés, drapée de son pagne, a œuvré dans l’ombre de son mari.

Maman Muilu Marie Kiawanga Nzitani est née le 7 mai 1880 à Nkamba, elle est la fille de Papa Mfuka originaire de N’Kamba et de Maman Tuba, originaire de Kingombe. Sa date de naissance varie selon les biographes.

Le prophète Simon Kimbangu a épousé d’abord coutumièrement, Maman Marie Muilu Marie, le couple se mariera religieusement plus tard à Ngombe-Lutete.

Papa Simon Kimbangu avait pour habitude de soliloquer. Un jour, en pleine nuit, à demi conscient, il monologue quelques bribes de phrases dans son sommeil, il fut interrompu par sa femme, lassée sans doute, par ses monologues incessants : « Pourquoi parles-tu dans ton sommeil ? ».

Ce dernier répondit en disant que Jésus-Christ vient de lui confier une grande mission.

Saisie de frayeur, Maman Marie Muilu promit de soutenir son mari quoi qu’il arrive.

Le 6 avril 1921, elle retentit la cloche à 6 heures du matin, à la demande de son mari.

L’acte de puissance divine commença ce jour-là, Simon Kimbangu aurait guéri une femme agonisante, Madame N’Kiantondo. Cette nouvelle s’est répandue, depuis les foules ne cessèrent d’affluer N’Kamba. Ainsi Papa Simon Kimbangu guéri les malades, les paralytiques, les aveugles, les sourds et ressuscita les morts.

Les missionnaires voyaient leurs églises se vider, l’administration coloniale craignant une subversion politique ordonna l’arrestation du prophète. L’administrateur Snoeck procède à leur arrestation le 12 septembre 1921.

Ils furent arrêtés et sauvagement battus avec leurs trois enfants. Elle sera séparée de son fils aîné Charles Kisolekele, et assignée à Ngombe Kinsuka avec ses deux enfants, Salomon Dialungana et Joseph Diangienda. Le 3 octobre, Papa Simon Kimbangu est condamné à mort, il confie à sa femme la responsabilité de l’église.

Elle organisait clandestinement des rencontres, malgré les mauvais traitements que les autorités coloniales lui infligeait. L’église Kimbanguiste n’aurait, peut-être, pas, jamais vu le jour sans sa présence et sa persévérance.

Le 12 février 1959, elle octroie les cartes de catéchistes aux premiers responsables de l’église kimbaguiste dans le but de poursuivre l’œuvre et, délègue le pouvoir à son fils Joseph Diangenda Kuntima.

Le 27 avril 1959, Maman Marie rend l’âme et sera enterrée, deux jours après à Ngombe Kinsunka.

On lui prête un message prémonitoire, quelques jours avant sa mort : « Si je ne pars pas, cette situation ne changera guère, la parole du prophète doit s’accomplir ». L’église Kimbanguiste fut reconnue officiellement par l’Etat colonial, le 25 décembre 1959,et le Congo fut libéré du joug colonial, le 30 juin 1960.

L’Eglise kimbanguiste revendique aujourd’hui des millions de fidèles à travers le monde (30 millions), 10 millions en RDC, elle a malheureusement abandonné ses aspirations premières, celles de l’émancipation de l’homme noir et de la lutte contre les injustices, elle s’est accommodée et collaborée avec tous les pouvoirs qui se sont succédé (Kasa-Vubu, Mobutu, Kabila père et fils, Félix Tshisekedi) contrairement à l’Eglise catholique, qui dénonce la mauvaise gouvernance et la corruption qui minent la classe politique ainsi que les violations au respect des Droits de l’homme.

 

Jean-Claude Mombong

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