Dans la galaxie mobutienne, il n’y a plus de soleil. C’est à peine si une poignée d’étoiles y scintillent encore. Chez Jonas Mukamba, sa passion pour la politique lui tenant lieu de foi, la lumière reste toujours allumée et la fidélité au Maréchal Mobutu demeure intacte.
Tous les matins, il s’habille, costume et cravate et reçoit tout le monde : élus, ministres, historiens, familles, chercheurs, journalistes, associations, en buvant force thé vert. Il est une mine de renseignements.
M. Jonas Mukamba Kadiata Nzemba
Je garderai un souvenir indélébile, ce qui n’est pas peu dire-de ma rencontre avec ce grand personnage historique et serviteur de l’État.
Si la MIBA (société minière de Bakwanga) avait un visage, ce serait celui de Jonas Mukamba Kadiata Nzemba.
Avec une limpidité impériale, il m’a expliqué l’histoire du Congo et les enjeux à venir. Il m’a fait comprendre que lorsqu’il était aux affaires, il ne s'intéressait guère à ce qu’il appelait dédaigneusement les affaires domestiques, c'est-à-dire la politique politicienne qui lui semblait agitée de querelles lilliputiennes.
Je me suis rendu compte qu’au cours de cet entretien que l’oralité reste pour nous africains, une véritable source indispensable de savoir, de connaissance, de mémoire et de transmission. J’ai beaucoup appris.
En Afrique, quand un vieillard meurt, c’est une bibliothèque qui brûle, cette phrase qui est attribuée M. Amadou Hampâté Bâ, a trouvé son importance aujourd’hui. En effet, M. Jonas Mukamba Kadiata Nzemba est une bibliothèque vivante.
Retracer les itinéraires des grands serviteurs de l’Etat et des personnalités qui ont marqué l’histoire de notre pays, c’est faire œuvre d’un travail de grande utilité historique et intellectuelle pour notre jeunesse.
M. Jonas Mukamba Kadiata Nzemba est une bibliothèque, un témoin de l’histoire qui a traversé toutes les décennies et de moments marquants de notre histoire.
C’était un grand privilège d’échanger avec lui, il est l'un des témoins, et acteur de l'Histoire congolaise. Il m’a éclairé, il a modifié mon jugement et complété ma culture politique et historique. C’est en somme un pédagogue lumineux. Il surplombe intellectuellement son époque.
Né le 4 janvier 1931 à Tshikapa, il a fêté cette année ses 92 ans, j’ai été frappé par la clarté et la rigueur de ses analyses ainsi que de ses approches sur l’histoire politique du Congo.
Il m’a fait passer un véritable examen d’histoire, aussi impromptu qu’exigeant, on est passé de sa biographie, à l’histoire du pays avec un grand H pendant un interminable deux heures du temps.
Il m’a expliqué l’origine de son nom en Tshiluba avec tout ce que cela suppose de mythes, de symboles et de sacré.
Bien sûr, l’homme est loin de satisfaire tout le monde. Nous avons évoqué rapidement l’assassinat de Lumumba, il m’a présenté les faits bien loin de la présentation mensongère qui en a été donnée.
Il m’a parlé de son amitié avec Mobutu, ils se sont connus en 1956, lors d’une fête organisée au zoo par des éditeurs, Mukamba était accompagné Jean-Jacques Kande et Kanza. Leur amitié avec Mobutu est née de la passion de l’écriture, Mukamba signait sous le pseudonyme de Josco (Jonas son prénom) et Scolastique, le prénom de sa fiancée dans le courrier d’Afrique, Mobutu signait sous le pseudonyme de Debanzy.
C’était au cours de cet événement qu’un ami commun les a présenté, ils habitaient tous Yolo Kapella. Ils sont devenus amis, ils prenaient le bus ensemble. C’est d’ailleurs Mobutu qui a accompagné Mukamba lorsqu’il a quitté Léopoldville en 1957 au beach Ngobila traversant par Brazaville via Belgique. Les deux avaient une belle plume.
En évoquant son enfance, il a insisté sur les valeurs familiales, il est très attaché à la culture Luba.
Fils d’Ilunga Lubumbashie et Ngomba Shilumbayi, famille nombreuse de 18 enfants, son père était animiste et mari de 4 femmes.
Nous parlerons plus tard de son parcours scolaire et professionnel. Il a été parmi les premiers universitaires congolais avant l’indépendance. Ses condisciples au centre universitaire de Kisantu en 1954 furent Marcel Lihau, Diomi, Maker Kahunda, Firmin Krubwa, etc.
Greffier au parquet général de Léopoldville en 1955. Jusqu’à l’indépendance du Congo, 28 congolais suivent des études à Bruxelles, en 1957, Jonas Mukamba part en Belgique et s’inscrit à l’université de Louvain. Ils retrouvent Thomas Kanza, Paul Mushiete, Claude Mafema, Justin Bomboko, Marcel Lihau, Mario Cardoso, Albert Atundu, Albert Bolela, Charles Bokonga, André Mandi, François Ngyese, Pascal Kapella, Albert Ndele, Albert Mpase, etc. On retrouve une jeune Congolaise, aussi, Philomene Makolo.
Fidèle en amitié, il accueillit Mobutu en 1960 à l’exposition de Bruxelles et l’hébergeât avec sa femme et ses deux enfants.
Il a été directeur de cabinet en 1960 d’Albert Kalonji, ministre provincial, membre du collège des commissaires généraux en 1960, député en 1964,plusieurs fois gouverneur, ambassadeur en Ouganda, Suisse, Royaume et Italie.
Pendant 10 ans, il a été président de la Miba.
Jean-Claude Mombong