Les administrateurs des territoires et leurs adjoints accumulent 17 mois d’arriérés

Les administrateurs des territoires et leurs adjoints accumulent 17 mois d’arriérés

« Nous, soussignés, administrateurs et administrateurs assistants des 145 territoires de la République Démocratique du Congo, nommés par l'Ordonnance du 18 novembre 2022, venons par la présente pétition attirer l'attention de Votre Haute Autorité sur une problématique urgente affectant le bon accomplissement de notre travail et susceptible de mettre en péril la sécurité de notre pays ».

Par ces termes que les administrateurs de 145 territoires de la RDC ont adressé une pétition au chef de l’Etat le 22 avril 2024 portant sur leur situation précaire. En janvier 2023, ils ont été appelés à rejoindre leurs différents postes où les notifications de prise de fonction leur seront données sur place, sans pourtant bénéficier d'un soutien financier pour les frais de déplacement et d'installation. Cette façon de procéder les a placés dans une situation précaire dès le début de leur mandat.

Depuis le 15 mai 2023 que le Vice-premier ministre, ministre de l’Intérieur, Sécurité et Affaires Coutumières a, par sa lettre, transmis pour contreseing la grille barémique de la prime d’itinérance au ministre d’Etat, ministre du Budget en vue de les aligner à ladite prime pour renforcer l’autorité de l’Etat à partir de la base conformément à sa vision. Ce dossier est malheureusement reste toujours bloqué au ministère du Budget.

« A ce jour, soit 17 mois depuis notre entrée en fonction ; nous n'avons bénéficié d'aucun soutien financier, que ce soit pour les salaires, les primes d’itinérance, les frais de fonctionnement, les subventions spécifiques et les appuis pour le fonctionnement des 145 comités locaux de sécurité de nos divers territoires (cfr article 31 du décret n°22/44 du 06/12/2022 portant création, organisation et fonctionnement des Comités Provincial et Local de Sécurité) ni de la part du Gouvernement central ni des divers Gouvernements Provinciaux. De surcroît, nous manquons des moyens de déplacement indispensables pour les itinérances dans les différentes régions de nos territoires, ainsi que pour répondre à d'autres besoins essentiels. La carence de ces moyens financiers et matériels entrave le bon fonctionnement des entités déconcentrées que nous gérons ».

Malgré de nombreuses démarches que ces administrateurs des territoires ont effectuées auprès de leurs autorités de tutelle et leurs cris de détresse auprès du chef de l’Etat via leur correspondance du 1er septembre 2023, aucune solution n'a été trouvée. Leurs autorités de tutelle avaient jadis justifié cette situation en invoquant l'absence de prise en compte de leurs rémunérations dans le budget 2023, reportant ainsi la résolution de ce problème au budget 2024.

Cependant, tel fut leur désarroi de constater que la loi des finances 2024, telle que promulguée par le président de la République, n’a pas non plus prévu des crédits pour la territoriale, laissant leur situation inchangée. « Nous sommes désagréablement surpris le samedi 23 mars 2024 d'apprendre le décès inopiné, dû à une crise cardiaque, de notre très cher collègue Faustin Tshimanga Tshisuaka, Administrateur de Territoire de Popokabaka, dans la Province du Kwango. La tragédie de la disparition de notre cher collègue, juste au moment où nous venons de découvrir avec stupéfaction que les honorables députés et Sénateurs ont jugé moins utiles d'allouer des crédits à la territoriale dans la loi des finances 2024, est le reflet d'une réalité plus sombre et profondément troublante ».

Comment imaginer dans un pays en proie à plusieurs décennies de guerre, que les députés et sénateurs puissent bénéficier de plusieurs dizaines de milliers de dollars en terme d'émolument et à contrario, on prévoit zéro franc congolais aux administrateurs et administrateurs de territoires assistants qui, dans les régions les plus éloignées du pays, se lancent dans des périples éprouvants, parcourant, 20 jours sur 30, d'impitoyables brousses, forêts et savanes à moto, à vélo et à pied pour rétablir l’autorité de l’Etat, maintenir la stabilité et garantir la sécurité ?

« Nous sommes contraints de mendier auprès de ceux que nous sommes censés administrer et nous nous retrouvons dans une situation inconcevable de dépendance humiliante. Notre labeur quotidien est assombri par le spectre de la mort, comme en témoigne la perte tragique de notre cher collègue Faustin Tshimanga Tshisuaka. En cette heure sombre, nous sommes confrontés à une réalité déchirante : L'avenir de nos enfants est en jeu, dans un pays qui pourtant prône la défense des principes fondamentaux de l’Etat de droit. Comment les autorités de notre pays peuvent-elles rester indifférentes devant la détresse de ces gardiens de la stabilité, ces protecteurs dévoués qui sacrifient leur vie pour préserver l'unité nationale ? »

Les administrateurs des territoires et adjoints sont frustrés et indignés par cette injustice. Car, nommer des individus à des postes de haute responsabilité sans leur fournir les moyens nécessaires pour remplir leurs fonctions est non seulement absurde, mais également inhumain. « Face à cette impasse, nous sollicitons votre intervention pour garantir notre survie et celle de nos familles. Car, nous jouons un rôle stratégique en tant que vos représentants pour assurer la stabilité dans les 145 territoires de notre pays ».

Les exposer à une telle situation de précarité, met en péril non seulement leur bien-être personnel, mais également la stabilité et la sécurité du pays. Le risque que court le pays provient du fait qu'au moins 51 des 145 territoires sont frontaliers avec au moins un des pays voisins de la RDC. Il est donc évident que l'exposition des dirigeants de ces zones stratégiques que sont les territoires à la précarité, les rendent vulnérables à la corruption. Cette fragilité constitue une menace sérieuse qui demande une action immédiate pour prévenir des conséquences graves.

C'est pourquoi, les administrateurs des territoires et leurs adjoints prient le chef de l’Etat, en sa qualité de garant de bon fonctionnement des institutions de la République, de bien vouloir s’impliquer personnellement afin qu’ils bénéficient des avantages financiers dus à leur rang, notamment les salaires, les primes d'itinérance, les frais de fonctionnement ainsi que la subvention spécifique et les appuis des provinces pour le fonctionnement des Comités Locaux de Sécurité respectifs. Cela leur mettra dans des bonnes conditions de travail pour garantir la continuité des services essentiels dans les territoires et contribuer efficacement au renforcement de l'autorité de l'Etat à la base.

 

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