Le Congo en guerre : urgence d’un gouvernement d’exception

Le Congo en guerre : urgence d’un gouvernement d’exception

Introduction

Depuis l’intensification des attaques du fameux groupe terroriste rwandais M23 contre la population des alentours de Goma, la jeunesse congolaise s’est mobilisée comme un seul homme. Elle dénonce certes cette énième attaque terroriste, mais aussi le laxisme du Gouvernement congolais, et fait nouveau, les chancelleries occidentales prises dans leur ensemble. Les actions musclées de la jeunesse les ont visées particulièrement, rompant même le cordon sécuritaire qui les a toujours protégées. Dans ces conditions, que doit faire le Président de la République, le garant de la sécurité de la population et de l’unité nationale ? Quelle solution objective peut, non seulement, endiguer le phénomène de la terreur dans notre pays, mais surtout mettre fin définitivement aux tentatives assumées de génocide du peuple congolais ?  Telle est la  problématique qu’aborde cet article. Je propose la mise en place urgente d’un gouvernement d’exception.

L’exemple de l’état de siège en Ituri et au Nord-Kivu

On se souvient qu’en 2021, faisant face à la même pression mortifère venant de ce même groupe terroriste rwandais, le président Tshisekedi et son gouvernement avaient eu la lucidité de mettre en place un régime d’état de siège, c’est-à-dire un régime militaire pour les provinces d’Ituri et du Nord-Kivu. Il était entré en vigueur à la date 06 mai de cette année-là et des militaires furent nommés dans tous les postes d’administration, y compris dans les cours et tribunaux. Ainsi le pays, dirigé par un civil, connaissait dans cette partie du pays un régime d’exception militaire.

En vertu de son serment à la nation de maintenir l’indépendance et l’intégrité du territoire congolais et de sauvegarder l’unité nationale (article 74), le président avait évoqué l’article 85 de la constitution qui stipule ceci. « Lorsque des circonstances graves menacent, d’une manière immédiate, l’indépendance ou l’intégrité du territoire national ou qu’elles provoquent l’interruption du fonctionnement régulier des institutions, le Président de la République proclame l’état d’urgence ou l’état de siège après concertation avec le Premier ministre et les Présidents des deux Chambres conformément aux articles 144 et 145 de la présente Constitution. Il en informe la nation par un message. Les modalités d’application de l’état d’urgence et de l’état de siège sont déterminées par la loi ».

Il est à noter que depuis lors et jusqu’à présent cet état de siège subsiste étant donné que les objectifs pour lesquels il a été instauré n’ont pas encore été atteints. Il a été régulièrement renouvelé, certainement plus de 50 fois. Dans ces conditions, on est en droit de se poser des questions sur son efficacité. Certains parlent même d’échec vu le nombre toujours croissant des attaques des groupes terroristes d’une part et l’augmentation constante des victimes civiles et des déplacés d’autre part. A quoi a-t-il servi d’accorder les pleins pouvoirs aux militaires si les résultats attendus sont aussi insignifiants, d’autant qu’ils n’arrivent pas à vaincre les terroristes ni administrer efficacement les territoires qui leur sont confiés ? Il paraît donc urgent de faire le point sur cet état de siège afin de l’améliorer et de le rendre plus efficace selon la volonté de la constitution. Il est évident que sa limitation aux seules provinces de l’Ituri et du Nord-Kivu l’a confiné à un fait strictement régional alors que la constitution parle d’un fait national. Son accompagnement médiatique demeure inexistant. D’où l’impératif d’un engagement plus national et de son élargissement à l’ensemble des provinces pour lui permettre d’atteindre rapidement les objectifs de la sécurisation recherchée.

Impératif d’une généralisation de l’État de siège provincial

Si en 2021, les attaques se concentraient principalement aux deux provinces d’Ituri et du Nord-Kivu, depuis lors, l’ennemi a changé de tactique et vise désormais tout le pays. Son but avoué est de s’emparer du pouvoir total. Le président Paul Kagame, chef affirmé de M23, a menacé non seulement d’envahir tout le Congo, mais de réduire sa population en esclavage comme ce fut le cas il y a trois siècles. Il a soutenu que ses parrains se garderont de le réprimander. La situation est donc grave vu tout le soutien militaire, diplomatique et financier qu’il reçoit à foison de la part de l’Occident et de son OTAN. Étant donné qu’il est question de vie ou de mort comme l’a bien compris notre peuple, je suggère d’étendre le régime d’état de siège à l’ensemble de nos provinces plutôt que d’y mettre fin. C’est-à-dire que toutes nos vingt-six provinces y compris la ville de Kinshasa soient dirigées par des militaires, mais au niveau du gouvernorat uniquement. Les autres entités et services étatiques demeureront aux mains des civils sous la supervision des gouverneurs militaires. La mission de ces gouverneurs militaires sera de sécurité le territoire national dans un bref délai à travers les provinces qui leur seront confiées.

L’urgence d’un gouvernement d’exception

Dans cette conjoncture, l’urgence d’un gouvernement d’exception s’impose. Le président de la République étant le Commandant Suprême de l’Armée et de la Police assumera pleinement cette prérogative en s’entourant d’un gouvernement d’exception ou d’urgence. Je propose que celui-ci soit conduit par un premier ministre militaire et que certains ministères soient aussi dirigés par des militaires. Je pense aux ministères de la Défense nationale et sécurité, au ministère de l’Intérieur, au ministère des Finances et budget, au ministère des Mines et au ministère de la Justice.

La mission du nouveau gouvernement sera d’appuyer les gouverneurs des provinces ainsi que l’armée nationale pour mettre fin rapidement à la guerre nous imposée par l’OTAN et leur homme de main Paul Kagame. Unis et motivés, nous pouvons y arriver en nouant, le cas échéant, des alliances avec des partenaires plus fiables et plus sensibles à notre détresse. En Afrique, plusieurs pays dans la même situation s’en sortent à travers des coopérations nouvelles. Car le monde est aujourd’hui multipolaire et multilatéral. C’est une chance que notre pays peut aussi saisir.

Dans cette configuration, les parlements récemment élus garderont leurs prérogatives législatives constitutionnelles et accompagneront, eux aussi, le gouvernement central et les gouvernements provinciaux dans la réalisation rapide et efficace de la mission que la nation toute entière leur confiera. Et ce sera après sa pacification totale que notre pays envisagera sa renaissance, sa reconstruction et sa refondation en se donnant des institutions nouvelles, adaptées et susceptibles de répondre aux attentes de notre peuple longtemps meurtri, y compris celui de nos campagnes et quartiers populaires. Vouloir reconstruire le pays dans la situation actuelle, c'est mettre la charrue avant les bœufs. Il va sans dire que les militaires appelés à accompagner le chef de l’État, chef de la Nation, dans cette lourde tâche doivent lui être les plus loyaux, les plus dynamiques, les plus patriotiques, les plus honnêtes et les plus braves.

Aujourd’hui, notre pays et ses institutions de Kinshasa ne peuvent plus continuer à vivre comme si de rien n’était, comme si la guerre leur était étrangère, qu’ils n’en étaient nullement concernés. Cette guerre est contre notre pays tout entier, elle doit impliquer chacune d’entre nous en commençant par les dirigeants. Nos jeunes, étudiants, commerçants, entrepreneurs, fermiers, etc., filles et garçons, doivent rester mobilisés pour sauver la nation en péril.

Professeur Kentey Pini-Pini Nsasay
Inadep / Université de Bandundu

 

 

 

 

 

Notice bibliographique

 

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