Après deux mois de guerre, le Soudan s'enfonce dans la crise.
Le meurtre d'un gouverneur de l'armée soudanaise dans la région du Darfour a ravivé les tensions entre les deux camps.
L'ONU s'inquiète d'un « désastre humanitaire » à venir.
Après deux mois de combats meurtriers, le conflit au Soudan a connu une nouvelle escalade avec le meurtre d'un gouverneur dans la région du Darfour. Le chef de l'armée a accusé jeudi les FSR - des paramilitaires opposés à l'armée soudanaise - d'avoir capturé et tué ce gouverneur, Khamis Abdullah Abakar, après qu'il a donné un entretien par téléphone à une télévision saoudienne mercredi, où il critiquait les paramilitaires. Les FSR ont nié être responsables de cet « assassinat » mais selon l'ONU, « des récits convaincants de témoins [leur] attribuent cet acte ».
Aucun scénario de retour à la paix ne se dessine dans ce conflit qui a débuté le 15 avril. Dans ce pays d'Afrique de l'Est, l'un des plus pauvres du monde, l'armée, commandée par le général Abdel Fattah al-Burhane, affronte les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) du général Mohamed Hamdane Daglo. « Même en imaginant le pire, nous ne pensions pas que cette guerre durerait si longtemps », a confié jeudi à l'AFP Mohamad al-Hassan Othman, un habitant du sud de Khartoum qui a fui.
Plus d'eau potable ni d'électricité
Les combats se sont jusqu'à présent essentiellement concentrés à Khartoum et au Darfour, une vaste région frontalière du Tchad, déjà meurtrie par une guerre civile dans les années 2000. A Khartoum, des quartiers entiers n'ont plus d'eau potable. L'électricité fonctionne quelques heures par semaine et la plupart des hôpitaux dans les zones de combat sont hors d'usage. Les violences ont fait plus de 2.000 morts, selon le dernier bilan de l'ONG ACLED.
Plus de 2,2 millions de personnes ont fui, dont plus d'un million ont quitté Khartoum, selon l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), tandis que plus de 528.000 réfugiés sont arrivés dans les pays voisins. Pendant plusieurs semaines, l'Arabie saoudite et les Etats-Unis ont servi de médiateurs à des négociations en vue d'un cessez-le-feu. Mais les nombreuses trêves annoncées n'ont quasiment jamais été respectées, empêchant l'aide humanitaire de parvenir aux millions de civils désespérés.
Dépendant de l'aide humanitaire
Près de la moitié de la population, soit 25 millions des 45 millions d'habitants du Soudan, dépend désormais de l'aide humanitaire pour survivre, selon l'ONU. Cette aide est parvenue jusqu'à 1,8 million de personnes, soit une fraction de ceux qui en ont besoin.
Une conférence internationale sur l'aide au Soudan parrainée par Ryad est prévue le 19 juin à Genève. « Le Darfour se dirige rapidement vers un désastre humanitaire », a alerté jeudi le responsable de l'ONU pour les affaires humanitaires, Martin Griffiths. « Le monde ne peut permettre que cela se produise. Pas une nouvelle fois », a-t-il déclaré dans un communiqué.
Washington a confirmé ce constat jeudi, en condamnant avec force les « horribles violences » commises au Soudan. Les Etats-Unis ont jugé « crédibles » des informations faisant état de violations des droits humains par les forces paramilitaires. Ces atrocités sont « un sinistre rappel » des événements des années 2000, a estimé un porte-parole du département d'Etat américain.
Source : AFP