Cardinal Laurent Monsengwo Pasinya : l’homme qui tenait tête à tous les pouvoirs politiques qui se sont succédé en RDC

Cardinal Laurent Monsengwo Pasinya : l’homme qui tenait tête à tous les pouvoirs politiques qui se sont succédé en RDC

La voix du cardinal Monsengwo Pasinya s’est tue définitivement le 10 juillet 2021, à l’âge de 81 ans, à Versailles, six jours après son évacuation en France, dans un état critique.

Dernière cette voix monocorde et sa soutane se cachaient le costume d’un redoutable homme politique et une des dernières personnalités d’envergure qu’ait connu la RDC.

Ces phrases cultes ont marqué les esprits : « Que les médiocres dégagent ». Il a qualifié le discours du Chef de l'Etat Joseph Kabila de « logorrhée » ou au lendemain de la marche des chrétiens du 21 janvier 2016, lorsqu’il s’est indigné en des termes virulents : « Nous voulons que règne la force de la loi et non la loi de la force ».

En paroles et en actes, il a accompagné l’accouchement difficile de la démocratie de la RDC en combattant la dictature du président Mobutu et de ses successeurs.

Il avait été l’une des voix critiques à l’égard des différents régimes qui se sont succédé en RDC.

Il a été intraitable avec le maréchal Mobutu, le président M’zee Laurent -Desiré Kabila, l’ancien président Joseph Kabila et l’actuel président de la République, Félix-Antoine Tshisekedi.

C’était une voix qui portait, il a été un véritable contre-pouvoir lui seul, il avait joué un rôle majeur pour l’ouverture démocratique au Congo pendant les dernières années de la dictature du maréchal Mobutu.

Né le 7 octobre 1939 à Mongobelé dans la province de Bandundu, Monseigneur Laurent Monsengwo a fait ses études primaires à Nioki et secondaires au petit séminaire de Bokoro, il intègrera plus tard le grand séminaire de Kabwe où il suit le cycle de philosophie avant de partir pour Rome suivre à l'Université pontificale urbanienne le cycle de théologie. Il est ordonné prêtre le 21 décembre 1963.

Polyglotte, il parle 14 langues, en 1970, il est le premier Africain à obtenir un doctorat en Écriture sainte à Rome.

Archevêque de Kisangani en 1988, en 1991, il est président du Bureau de la Conférence nationale souveraine au Zaïre, en 1992, il devient président du Haut Conseil de la République, (parlement de transition). Il s’impose comme l’un des acteurs majeurs de la transition démocratique en RDC.

Devenu archevêque de Kinshasa en 2007, il est fait cardinal par Benoît XVI en 2010.

Pendant les différents moments critiques de la vie politique congolaise, ses prises de parole ont l’effet d’une bombe et dérangent tous les pouvoirs successifs : de Mobutu, Kabila père et fils, et du président Félix Antoine Tshisekedi.

Il se singularise à l’occasion des élections, il dénonce avec virulence les mascarades électorales. Joseph Kabila en fait les frais lorsqu’il a envisagé de modifier la Constitution pour prolonger son mandat au-delà de 2019.

Il tacle Joseph Kabila déclaré vainqueur en 2011 : « Les résultats du scrutin du 28 novembre ne sont conformes ni à la vérité ni à la justice ».

Après les violences policières du 31 décembre 2018 sur des manifestants opposés à la modification de la constitution, il affirme : « Il est temps que la vérité l’emporte sur le mensonge systémique, que les médiocres dégagent et que règnent la paix, la justice en RDC ».

En 2019, Félix Antoine Tshisekedi est élu président, il conteste, il affirme sur la base des résultats compilés par la Cenco que c’est Martin Fayulu qui a gagné les élections.

L’annonce de son décès, le 11 juillet à Versailles, sera suivie d’hommages unanimes au sein de toute la classe politique congolaise.

Sur Twitter, le chef de l’État, Félix Antoine Tshisekedi a exprimé sa douleur et rendu hommage à ce « Prince de l’Église qui œuvra longtemps au service du peuple » et « fut l’un des acteurs majeurs de la démocratisation de notre pays ».

Laurent Monsengwo était un intellectuel qui jouissait d’un grand prestige en RDC pour son rôle politique.

La dépouille du cardinal Laurent Monsengwo Pasinya était arrivée à l’aéroport de Kinshasa, et sera inhumée le mercredi 21 juillet dans la cathédrale Notre-Dame du Congo, à Kinshasa, après un hommage du chef de l’Etat, Félix Tshisekedi.

 

Jean-Claude Mombong

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