Kinshasa au bord de l’asphyxie : quand la gouvernance provinciale devient une complicité silencieuse du chaos

Kinshasa au bord de l’asphyxie : quand la gouvernance provinciale devient une complicité silencieuse du chaos

Kinshasa, jadis surnommée « Kin la belle », s’enfonce aujourd’hui dans une dérive urbaine généralisée : une capitale livrée à elle-même, plongée dans une obscurité permanente, rongée par l’insalubrité chronique, piégée dans des embouteillages infernaux, et gouvernée par une élite provinciale dont le mutisme complice frôle l’irresponsabilité totale, constate Jonas Tshiombela, Coordonnateur de la Nouvelle société civile congolaise, Coordonnateur du Consortium "Démocratie et Droits de l'homme" et président l'ASBL de Promotion des Droits Civiques "Forces des Leaders Engagés du Congo".

Une ville capitale abandonnée dans le noir

La taxe d’éclairage public, perçue chaque mois par la SNEL, est supposée êtree reversée à l’Hôtel de ville pour garantir un éclairage de base dans les avenues, quartiers et places publiques. Pourtant, des centaines de quartiers restent plongés dans l’obscurité, devenus des repaires de criminels. Les coupures intempestives d’électricité ne sont plus un phénomène ponctuel, mais un mode de vie subi, qui alimente la peur, ruine les petits commerces, et mine la sécurité. Où va l’argent de cette taxe ? Qui rend compte ? La transparence budgétaire est inexistante. Ni la SNEL ni l’Hôtel de Ville ne publient de rapports d’affectation de cette taxe.

La REGIDESO et la SNEL : factures pleines pour services vides

Autre aberration : les factures exorbitantes de la REGIDESO et de la SNEL continuent de tomber chez les ménages, même en l'absence totale de service rendu. Eau coupée pendant des jours, électricité absente pendant des semaines, mais les montants restent constants. Cela s’appelle extorsion organisée, et cela se fait sous l’œil indifférent du gouvernement provincial et de ses élus.

Kinshasa, une capitale transformée en décharge à ciel ouvert

Le programme « Kin Bopeto », lancé avec fanfare, est aujourd’hui un slogan creux. L’insalubrité est devenue une signature de la capitale :
- Marchés infestés de mouches et d’eaux stagnantes,
- Poubelles débordantes dans les quartiers,
- Absence d’un système de collecte structuré,
- Odeurs pestilentielles jusque dans les artères principales. Et pourtant, la taxe d’insalubrité est perçue régulièrement par les services municipaux. À quoi sert-elle ?
Embouteillages monstres et anarchie routière : le chaos organisé
À Kinshasa, la circulation relève du parcours du combattant. Aucun plan de mobilité urbain cohérent. Les embouteillages paralysent toute activité économique. Les voies sont défoncées, poussiéreuses ou impraticables, même en centre-ville. Pendant ce temps, les "rois wewa" (moto-taxis) imposent leur propre loi. Sens interdits, surcharges, excès de vitesse, non-respect du code de la route : l’anarchie règne. Où est la police de circulation routière ? Où est le gouverneur ? Où sont les députés provinciaux ? Le silence des institutions est assourdissant.

Des élus provinciaux invisibles et inaudibles

L’Assemblée provinciale de Kinshasa, censée contrôler l’action du gouvernement provincial, est devenue une chambre d’enregistrement, réduite à des querelles politiciennes et à la défense d’intérêts personnels.
Aucune interpellation sérieuse, aucune motion de défiance, aucune enquête publique sur les taxes ou les services défaillants. Ce silence complice s’apparente à une trahison du peuple kinoise, livré à la débrouillardise et à la survie quotidienne.

Jusqu’à quand cette souffrance ?

La souffrance des Kinois n’est pas une fatalité. Elle résulte d’un effondrement systémique de la gouvernance locale, nourri par l’impunité, le détournement des ressources et l’indifférence des dirigeants.

Quelles solutions ?

Le coordonnateur de la Nouvelle société civile congolaise propose des pistes urgentes et concrètes à ces problématiques auxquelles font face les habitants de la capitale congolaise.
1. Audit public et indépendant des taxes perçues (éclairage, insalubrité, etc.) et de leur affectation réelle.
2. Publication mensuelle par la SNEL et l’Hôtel de Ville des revenus et investissements issus de ces taxes.
3. Réforme urgente de la régie municipale de propreté : contrats transparents avec des entreprises de collecte, suivi communautaire.
4. Plan de mobilité urbaine : réorganisation des axes de circulation, introduction de feux de signalisation modernes, formation des conducteurs motos.
5. Campagne d’éveil citoyen et mobilisation populaire : les habitants doivent exiger des comptes à leurs élus.
6. Contrôle parlementaire renforcé : l’Assemblée provinciale doit assumer son rôle de chien de garde de l’intérêt public.
7. Implication des quartiers : comités de veille populaire, avec reporting mensuel des services publics locaux.

Kinshasa mérite mieux

Les Kinois paient leurs taxes, mais ne reçoivent aucun service digne. Ce n’est plus une crise administrative, c’est une faillite morale de l’État local. Le changement ne viendra pas de slogans ou de promesses, mais de l’action citoyenne, de l’indignation organisée et de l’éveil collectif. Kinshasa n’est pas un dépotoir ni une jungle. C’est la capitale d’un grand peuple. Le peuple attend des actes.

La Gazette du Continent.

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