Evoloko Lay Lay : l’histoire fulgurante d’un génie de 14 ans et d’une vie happée par un succès précoce

Evoloko Lay-Lay et Jean-Claude Mombongo

Au fil du temps, Evoloko et moi, sommes devenus des vrais amis, avec une dose excessive d'admiration de mon côté. Il fête ses 69 ans, il a insisté qu’on souffle les bougies ensemble, au numéro 6 rue wafania à Yolo-Nord dans la Commune de Kalamu à Kinshasa.

Evoloko Laylay Antho Atshuamo, c’est l’histoire d’une ascension fulgurante d’un génie de 14 ans et d’une vie happée par un succès précoce.

Non conformiste. S’il faut résumer d’un trait sa longue et riche carrière couverte de six décennies. Cette épithète est celle qui lui convient le mieux.

Il est l’un des plus grands génies de la musique congolaise et l’une des dernières légendes de Zaïko Langa Langa.

À l' écouter chanter de près, je me rends toujours compte que la musique et Evoloko étaient faits l’un pour l’autre. Il est doté d’une voix exceptionnelle

À chacune de nos rencontres, il me retrace un fil cohérent de son parcours. Vadio Mabenga a joué un rôle considérable dans sa carrière, il est fan de Bozi Bozianna.

Evoloko est un prodige, il est de la race de Mozart, des précoces prodigieux.

Il est né le 20 mai 1954 à Léopoldville (Kinshasa) en RDC.

Fils de Joseph Evoloko et d’Aminata. Evoloko a étudié à Saint Gabriel à Yolo Nord dans la commune de Kalamu et éleve à l’Athénée  de Kalina (Gombe). Evoloko Lay Lay était un élève très moyen-une scolarité évanescente -, d’un tempérament impétueux, irascible et turbulent.

Pas très fan de l’école, le petit Antoine faisait souvent des siennes.

Tout a été dit et écrit sur l’homme.

Musicien à gros ego, Evoloko Lay Lay débute sa carrière dans le MAPS, il se distingue tout de suite par son génie, son talent précoce se confirme rapidement dans Zaiko en 1970. Très jeune, par le truchement de son ami Mecano, Evoloko Lay Lay intègre Zaïko, il rejoint le Papa Wemba, le président Jossart Nyoka Longo, Mavuela Somo et Manuaku Waku. Dès son entrée dans Zaïko, plus rien n’arrêtera une ascension qui fera de lui pendant six décennies l’un des plus grands chanteurs du Congo.

Evoloko Lay Lay sera l’une des personnalités et musiciens qui aura marqué cette période par son talent, ses chansons et ses extravagances.

Réputé pour ses performances scéniques, il se bâtit une  réputation inlassable de performeur scénique de cette époque. Il connaît son apogée dans les années 70 avec des succès colossaux : Eluzam, Mbeya Mbeya, Francine Keller, Charlotte Adieu etc.

Bête de scène, ce fut son apothéose, il sera le premier musicien de sa génération à posséder une voiture neuve et propriétaire d’une maison à l’âge 16 ans.

Evoloko Antoine, Anto Nickel, Anto le vilain, Tonton Bokulaka , Nkumu, Evoloko Lay Lay , Joker la carte qui gagne, Ayigola, Petit mobylette, Evoloko Atshuamo, Lay Lay Bitumba, Shérif etc, tous ces noms pour une seule personne démontrent à suffisance le genre d'homme qu'il est et l'étendue de son génie.

Evoloko  se singularisait par son talent exceptionnel, sa voix phénoménale et son  look atypique (une raie à la Lumumba).

Virtuose de chant, faiseur de tubes à succès et de hit parade, ses chansons inondent la radio et la télé, Zaiko Langa-Langa  est au sommet, Evoloko Anto explose : ''Mbeya Mbeya, Eluzam, Onassis Ya Zaïre'' sont de véritables chefs-d'œuvre.

Il fait ombrage à ses collègues et se laisse griser par le succès, avec les journalistes, les rapports furent tumultueux. Il élabore un concept d’une star en surplomb, à distance avec la presse. Ses interviews seront désormais monnayées, il déclare à qui veut l’entendre qu’il est devenu très célèbre et qu’il n’a pas besoin des journalistes chroniqueurs pour se faire connaître ; sa photo ne peut plus être publiée dans un journal sans son aval, pire, la direction lui verserait une somme-la presse poursuivant sa chute- les ventes repartent à la hausse grâce à lui. Il subira un embargo de la presse, aucune de ses chansons ne seront diffusées à la radio et à la télévision. Cette mesure sera levée plus tard par une grande autorité.

En 1974, il quitte Zaiko avec Papa Wemba, Mavuela et Bozi pour créer Isifi Lokole. 

Crise d’ego, il  s’accapare de l’orchestre, son aventure personnelle tourne court avec Isifi Melodia ( Vadio Mambenga, Djanana Djunes, Lifelo).

Retour à la case- départ, il retourne dans Zaiko en 1979 avec un nouveau succès, ''Fièvre Mondo'' une chanson anthologique, couronnée meilleure chanson de l’année en 1980.

Mais Evoloko ne supporte pas la discipline, l’organisation, surtout l’autorité incarnée par le président Jossart.

Il quitte de nouveau Zaiko en 1981, créé Langa Langa stars avec Bozi Boziana, Djanana, Djo Mali, Dindo Yogo, Espérant et Roxy Tshimpaka. Le succès est éphémère.

Acariâtre, invivable, ses collègues quittent le navire, il évolue seul avec des nouvelles recrues : Coco Anana, Mazeya, Dicky-Le- Roi et se distingue de nouveau avec des belles chansons comme Doné, Madadi etc.

Malheureusement pour lui, Papa Wemba domine l’arène musicale. Ça sera le début d’une subordination vis-à-vis de Papa Wemba qui devient le Kuru Yaka, Bokul et la star internationale. Evoloko ne suit plus, il perd du terrain et finit par s'exiler en Europe. 

Après un début très prometteur avec la chanson ''Mbonge'', arrangée par le maestro Suzy Kaseya, son périple européen ne lui réussit pas, il rentre au pays, il ne retrouve plus ses marques, l’époque a changé, le terrain musical est occupé par une nouvelle génération.

Evoloko est-il passé à côté d'une très belle carrière ? Il est vrai que son caractère l’emportait nettement sur son cerveau, comme tous les génies, il n’en demeure pas moins qu’il est parmi les plus grands musiciens qui ont marqué l’histoire de la musique congolaise.

Souhaitons-lui bon anniversaire

 

Jean-Claude Mombong

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